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mercredi 29 août 2012

Lettre ouverte au P.D.G. d'A.S.O. Retour sur une chasse aux sorcières à propos d'un pestiféré nommé Lance Armstrong


Monsieur le Président Directeur Général,


Regardez bien la carte ci-dessous, qui préfigure le projet de la grande course cycliste internationale qui devrait, bientôt, supplanter le Tour de France.



A.S.O., Amaury Sport Organisation, que vous présidez, est la maison-mère du Tour de France ainsi que d'organes de presse tels que Aujourd'hui-Le Parisien, ainsi que l'Équipe.

L'Équipe, c'est la référence française en matière de journalisme sportif, et c'est ce journal qui, un jour de juin 2010, s'est fendu de cette Une :


Un faux grossier, une immonde contrefaçon, comme au "bon vieux temps" où Staline faisait disparaître ses adversaires des clichés officiels.

Trotsky est passé par ici, Trotsky repassera par là...

En ce samedi de juin 2010, j'avais décidé de ne plus jamais lire ce torchon ou cette feuille de chou, ou de merde, et j'ai tenu parole jusqu'à il y a peu, et plus exactement, le samedi 25 août 2012. Et là, en voyant la Une de l'Équipe, je me suis dit : "Ce numéro, il va faire collector ; il faut absolument que tu l'achètes !".

Alors, tout en réprimant mon dégoût, j'ai de nouveau acheté cette feuille de chou, ou de m..., dont voici la Une :


Légende : "Le coureur américain renonce à contester les preuves accumulées contre lui par l'agence américaine antidopage (USADA). Dans la foulée, cette dernière a banni à vie le Texan de toute compétition et exigé qu'il soit déchu de ses titres conquis depuis 1998, dont les sept Tours de France remportés de 1999 à 2005...".

Depuis le temps qu'à l'Équipe, ils rêvaient d'afficher cette Une et de pouvoir sabler le champagne en célébrant la fin, le naufrage de leur ennemi juré, Lance Armstrong ! Ce numéro, je vous garantis qu'il va faire collector !

Mais cette Une n'est pas arrivée comme ça, comme un cheveu sur la soupe. Elle a été précédée d'un incroyable tohu-bohu entamé la veille, soit le vendredi 24 août 2012, notamment sur tous les médias électroniques, radios et télévisions ainsi que sur l'Internet. Et qu'a-t-on entendu ou lu sur tous ces médias électroniques ?

Une seule information : Armstrong déchu de tous ses titres dans le Tour de France !

Et moi de m'interroger : comment ça, déchu de tous ses titres..., et déchu par qui ? Ben, par l'USADA pardi !, semblaient répondre les médias.

L'USADA ?, me suis-je encore interrogé. Vous voulez dire avec U.S. comme United States ? Parce que l'U.S.ada est une instance juridictionnelle ? Et qu'est-ce qu'une agence dont le sigle commence par U.S. viendrait-elle faire dans les affaires du Tour de France ?

J'en étais là de ces cogitations, le vendredi 24 août 2012, lorsqu'une chaîne télévisée d'information a présenté la Une des quotidiens du lendemain, avec cette fameuse présentation de la nouvelle affaire Armstrong par l'Équipe, et c'est là que je me suis dit : "Il faut absolument que tu achètes l'Equipe demain, parce que ce numéro risque de faire 'collector'."

Voilà qui est fait !


Prochain épisode : Bouffées délirantes

La société américaine est coutumière d'un fait, qui se présente régulièrement sous la forme de "bouffées délirantes" assez extravagantes - pensons à l'"axe du mal", cher à George W. Bush -, le tout sur fond de puritanisme et de moralisme judéo-chrétien mal assumé, voire pas assumé du tout, comme avec ces incroyables kidnappings effectués aux quatre coins du monde, sur des présumés "terroristes" déportés vers Guantánamo, sur une terre étrangère, Cuba !, comme preuve du caractère délirant de l'opération. Ces bouffées délirantes ont produit, entre autres syndromes,  deux phénomènes particulièrement caractéristiques de cette extravagance, sous la forme de la Prohibition, d'une part, et du Maccarthysme, d'autre part : deux avatars de la célèbre et funeste Chasse aux sorcières.




Liens :  01  -  02


Propos sur le dopage : bouffées délirantes

Remontons un peu le cours de l'histoire.

Lance Armstrong est un ancien coureur cycliste américain, retraité maintenant du cyclisme professionnel et reconverti dans la pratique du triathlon. Son palmarès affiche sept victoires dans le Tour de France.

Or voilà des années qu'il est en butte aux ragots les plus divers et aux révélations les plus insidieuses, notamment de son ancien équipier, Floyd Landis, déchu d'une victoire dans le Tour de France pour dopage, mais aussi d'un certain nombre d'organes de presse.

Il semble que, le 23 août 2012, Armstrong ait posté sur son site Internet un message selon lequel il décidait de ne plus rien évoquer publiquement, sur ce qui lui semblait être du harcèlement.


Et voilà que "dans la foulée" (dixit l'Équipe), "l'USADA nous annonce que...".

Que quoi, au fait ?

Par parenthèse, est-on bien certain que ce soit l'USADA (agence états-unienne de la lutte antidopage) qui ait réagi publiquement - et dans la foulée - ou s'est-il agi d'une personne isolée parlant - un peu précipitamment - au nom de l'USADA ?

Pour mémoire, les Etats-Unis sont un pays du type continental, s'étendant sur plusieurs fuseaux horaires. Ce qui veut dire que quand il fait matin à New York, il fait encore nuit en Californie. Comment a-t-il été possible, dans ces conditions, que l'agence antidopage pour tout le territoire des Etats-Unis statue si vite sur le cas Armstrong, au point de le faire dans la foulée ? Est-on seulement certain que cette décision de l'USADA ait été prise dans le strict respect des statuts dudit institut ?

Pour ma part j'en doute, mais d'aucuns me diront que c'est un détail.

Un détail ?!

Finalement, dans leur précipitation à vouloir sabler le champagne, ces nigauds de l'Équipe auront rendu un grand service à Lance Armstrong, en révélant, à mots à peine couverts, qu'il faisait bien l'objet de harcèlement de la part de l'USADA.



Rappelons, pour commencer, que les Etats-Unis sont ce pays bourré de contradictions, dont les présidents fraîchement élus jurent sur la Bible, alors qu'au même moment, n'importe quel quidam peut accumuler chez lui moult armes de poing ou de guerre, au nom d'une sacro-sainte liberté de s'armer. Pays apparemment pétri de morale chrétienne, mais dont les fondations sont solidement ancrées dans la liquidation massive et totale d'un certain nombre de peuples indigènes. C'est ainsi, par exemple, que les indigènes natifs de la Côte Atlantique : Séminoles, Hurons, Mohicans, notamment, ont été rayés de la carte, de même qu'en Californie, par exemple, des battues étaient organisées pour aller traquer, jusque dans les canyons les plus escarpés, les derniers représentants de l'ethnie Yahi. Les manuels nous apprennent qu'il y avait, dans l'actuel territoire des Etats-Unis, près de cinq cents nations amérindiennes, presque toutes méthodiquement exterminées par des gens dont un bon nombre fuyaient l'Europe et ses guerres religieuses !

Pays paradoxal encore que ces Etats-Unis, avec ces candidats de droite, croyants jusqu'à la moelle des os, mais qui ne veulent surtout pas entendre parler d'une sécurité sociale censée venir au secours des plus pauvres !

Paradoxe encore, dans ce pays qui s'est libéré les armes à la main contre le joug de l'occupant anglais, et qui allait passer le clair de son temps à installer et soutenir des dictatures aux quatre coins du monde, à commencer par l'Amérique latine, combattant les militants syndicalistes ici, les partis de gauche là, le tout au nom d'un bien puéril anticommunisme. C'est ainsi que la C.I.A. s'est faite l'initiatrice et le bras armé de tant de mouvements anti-démocratiques dans le monde. Ce qui n'empêche nullement les dirigeants de ce pays de donner des leçons de démocratie à tout le monde, allant même jusqu'à déclencher des guerres sur des terres lointaines, au nom de la lutte contre l'"Axe du mal."

Encore un paradoxe ? Lors des derniers Jeux Olympiques, les Etats-Unis ont de nouveau raflé la palme de la nation la plus sportive en termes de médailles. L'ennui est que c'est aussi la nation la plus obèse du monde !

En matière de lutte anti-drogues, on ne sera pas surpris de constater que, là encore, on cultive le paradoxe. Prenons les drogues en général : à qui veut-on faire croire que les narco-trafiquants colombiens et mexicains gagneraient autant d'argent, s'il n'y avait pas aux Etats-Unis une clientèle abondante et solvable prête à acheter les substances hallucinogènes produites par leurs voisins du Sud ? Est-ce pour camoufler cette réalité-là que les Etats-Unis se lancent régulièrement dans des opérations tapageuses visant au kidnapping et à la déportation vers leurs prisons de trafiquants de drogue présumés n'ayant jamais foulé le sol américain, le tout dans la plus parfaite violation des droits humains ?

Cette même frénésie tapageuse se retrouve, tout naturellement, dans le domaine de la lutte antidopage, et me fait irrésistiblement penser à ces deux événements qui caractérisent profondément la mentalité puritaine et inquisitoriale de ce pays : la Prohibition et le Maccarthysme.

De la Prohibition, presque tous les historiens sont d'avis qu'elle est à la source même de la richesse de la mafia américaine. Encore un paradoxe, n'est-ce pas ? À moins que tout cela ne soit fort logique : dans la mesure où il y avait de l'argent à gagner, on peut comprendre que des politiciens et partis politiques véreux aient réalisé l'ampleur des profits qui seraient générés par le commerce illicite d'alcool et aient choisi, cyniquement, de "booster" la carrière de leurs partenaires mafieux (cf. la fortune du clan Kennedy !).

C'est en ces termes que l'encyclopédie Wikipedia (en anglais) présente la question de la Prohibition.
On January 17, 1920, Prohibition began in the United States with the Eighteenth Amendment making it illegal to sell, manufacture or transport alcohol. Despite alcohol production and consumption being made illegal, there was still a high demand for it from the public. The profits that could be made from selling and distributing alcohol were worth the risk of punishment from the government, which had a difficult time enforcing prohibition. There were over 900,000 cases of liquor shipped to the borders of American cities. Criminal gangs and politicians saw the opportunity to make fortunes and began shipping larger quantities of alcohol to American cities. The majority of the alcohol was imported from Canada, the Caribbean, and the American Midwest where stills manufactured illegal alcohol. 
In the early 1920s fascist Benito Mussolini took control of Italy and waves of Italian immigrants fled to the United States. The Sicilian Mafiosi also fled Sicily as Mussolini cracked down on Mafia activities in Italy. The Italian immigrants resided in tenement buildings. As a way to escape the poor life style some Italian immigrants chose to join the American Mafia.
The Mafia took advantage of prohibition and began selling illegal alcohol. The profits from bootlegging far exceeded the traditional crimes of protection, extortion, gambling and prostitution. Prohibition allowed Mafia families to make fortunes. As prohibition continued victorious factions would go on to dominate organized crime in their respective cities, setting up the family structure of each city. Since Mafia gangs hijacked each other's alcohol shipments, forcing rivals to pay them for "protection" to leave their operations alone, armed guards almost invariably accompanied the caravans that delivered the liquor. 
Le 17 Janvier 1920 marque le début de l’application de la Prohibition, avec l’application aux Etats-Unis du dix-huitième amendement (de la Constitution) rendant illégale la vente, la fabrication ou le transport d’alcool. Mais bien que la production et la consommation d'alcool fussent devenues illégales, il y avait toujours la demande du public était restée forte. Les bénéfices générés par la vente et la distribution d'alcool valaient la peine que d’aucuns courent le risque de se voir sanctionnés par le gouvernement, qui a eu beaucoup de mal à faire appliquer l’interdiction. Plus de 900.000 caisses d'alcool entrèrent dans les villes américaines. Les gangs criminels et les politiciens y virent l'occasion de faire fortune et commencèrent à importer de grandes quantités d'alcool dans les villes américaines. La majorité de l'alcool était importé du Canada, des Caraïbes et du Midwest américain où les alambics produisaient de l’alcool illégal. 
Dans les années 1920, le fasciste Benito Mussolini prit le contrôle de l'Italie et des vagues d'immigrants italiens commencèrent à fuir vers les États-Unis. Les mafiosi siciliens ont également fui la Sicile alors que Mussolini réprimait les activités de la mafia en Italie. Les immigrants italiens résidaient dans immeubles locatifs. Comme moyen d'échapper aux conditions de vie précaires, un certain nombre d’immigrants italiens choisirent de rejoindre la mafia américaine. 
Cette dernière profita de la Prohibition et commença à commercialiser de l'alcool illégal. Les profits tirés de la contrebande ont largement dépassé ceux générés par les crimes traditionnels comme la protection, l'extorsion de fonds, le jeu et la prostitution. La Prohibition a ainsi permis aux clans mafieux de faire fortune, et tandis qu’elle se poursuivait, des factions victorieuses ont réussi à s’imposer dans leurs villes respectives au sein du crime organisé, imposant également la mise en place de système claniques dans chaque ville. Par la suite, des gangs mafieux ont réussi à détourner des expéditions d'alcool effectuées par des concurrents, forçant leurs rivaux (plus faibles) à leur verser une contribution financière en échange d’une « protection » au cas où ils envisageaient d’opérer seuls, les caravanes de livraison d’alcool étant généralement accompagnées de gardes armés.
Dans l'article qui suit, il est affirmé, sans ambages, que la Prohibition est à l'origine même de la mafia. 
The Prohibition is the seed of mafia 
Fundamentalism in the United States went stronger and instilled into the people the idea that alcohol was the cause of all the evils and sins; therefore, banning alcohol consumption would end with these problems.
The prohibition of alcoholic beverages entered into force on July 1st, 1916 in 24 US states. This was the prelude of the enactment of the Prohibition at the federal level, which entered into force in 1919, following the approval of the 18th amendment to the Constitution. In this way, manufacturing, transportation and sale of alcoholic beverages was officially made illegal. The Prohibition was effective nationwide on January 16th, 1920. 
The law caused division and social upset. Law enforcement was troublesome. There were very few agents responsible for that task, their wages were poor and they got little support from the authorities. Illegal bars proliferated and smugglers brought spirits into the United States from Mexico or Canada. 
Pretty soon there was widespread corruption across the United States and gangsters ran the illegal spirits trade in many major cities. Only in Chicago, in the 1920's, there were more than 500 deaths as a result of the brawls among gangsters. In 1925, Al Capone started to control the business of illicit alcohol trade in the city. Multiple killings and huge proceeds from his mafia activities have been attributed to this man. In 1931, he was charged with tax evasion and sentenced to 11 years in a federal prison. 
In 1933, President Franklin Delano Roosevelt abrogated the Prohibition. However, each municipality or state retained the freedom to implement the measure.

Et voilà comment, de 1916, pour vingt-quatre États, 1920 pour la totalité du pays, à 1933, les Américains furent légalement privés du droit de consommer de l'alcool, le tout sur la base de bouffées délirantes ayant assailli quelques dames patronnesses et militants de ligues de vertu en mal de morale à deux balles et de démonstrations d'autoflagellation, lesdites ligues de vertu s'étant avérées n'être que de puissantes alliées de la mafia. Un comble !

S'il y en a un qui, s'il avait été plus âgé dans les années 1920, aurait probablement pris part à l'instauration de la loi sur la Prohibition, c'est Joseph McCarthy (1908-1957), dont Wikipedia nous brosse la biographie en ces termes : 
En dix ans de carrière au Sénat des États-Unis, McCarthy et son équipe sont devenus célèbres pour leurs diatribes contre le gouvernement fédéral des États-Unis, et pour leur campagne contre tous ceux qu'ils soupçonnaient d'être ou de sympathiser avec les communistes. Cette période comprise entre 1950 et 1954, connue sous le nom de « Peur rouge » (Red Scare), a aussi pris le nom de maccarthysme.
(…)
Pendant cette période, tous ceux qui étaient soupçonnés de sympathies communistes devinrent l'objet d'enquêtes, collectivement nommées la « Chasse aux Sorcières ». Des gens des médias, du cinéma, du gouvernement et de l'armée furent accusés d'être des espions à la solde des Soviétiques.
(…)
Le terme de maccarthysme est depuis devenu synonyme d'activités gouvernementales visant à réduire l'expression d'opinions politiques ou sociales gauchisantes, en limitant les droits civils au nom de la sécurité nationale. (…) McCarthy se lança aussi dans la destruction politique de ses contradicteurs, une tactique couronnée par sa campagne de 1950 contre Millard Tydings qui avait été quatre fois réélu ; cette victoire intimida les critiques. McCarthy avait fait distribuer une photographie de Tydings en compagnie d'un communiste célèbre, ce qui mit un terme à la carrière de Tydings dans ce qui allait devenir « l'élection la plus sale de l'histoire de la politique américaine ». (…)En décembre 1954, McCarthy fut censuré par le Sénat américain par 67 voix contre 22, et fut définitivement écarté de la vie politique. Sombrant dans l’alcoolisme, il mourra trois ans plus tard de problèmes hépatique 
liés à d'importants abus de boisson.
Entre nous, n'est-ce pas un comble que cet "incorruptible" auto-proclamé qu'était McCarthy soit mort, âgé d'à peine 49 ans, de... surconsommation d'alcool ?

De l'article de Wikipedia, je retiens ceci : 
Le terme de maccarthysme est depuis devenu synonyme d'activités gouvernementales visant à réduire l'expression d'opinions politiques ou sociales gauchisantes, en limitant les droits civils au nom de la sécurité nationale. 
Voilà qui traduit bien la névrose profonde dont souffre ce pays que sont les Etats-Unis : d'une part, on se targue d'être le pays le plus démocratique du monde mais, par ailleurs, on pratique la torture dans le plus grand secret, on déclenche des guerres aux quatre coins du monde, histoire de semer l'enfer et la désolation chez les autres, tout en n'hésitant pas à manipuler les lois domestiques au nom de soi-disant intérêts supérieurs, qui sont avant tout les intérêts d'une oligarchie militaro-industrielle, comme naguère, à propos du communisme, plus récemment, à propos des "armes de destruction massive de Saddam Hussein", et actuellement, à propos de la guerre contre le terrorisme.

Le fait est que cette société nord-américaine, à la fois puritaine et cynique, et qu'on dit tellement libérale et tellement prompte à dispenser des leçons de morale à tout le monde, est restée profondément maccarthyste et capable des plus grossières violations des libertés publiques, au nom de la sécurité nationale. Mais il paraît qu'il ne faut pas le répéter trop fort !

Trop tard ! Le mouvement Occupy Wall Street a décidé de l'ouvrir, et bruyamment !


Prochain épisode : Science sans conscience



Réflexions sur le dopage : science sans conscience


La lutte antidopage ou la déroute des scientifiques

"J'ai subi récemment des examens des os, et les tests de densitométrie ont révélé que j'avais le squelette d'une vieille de soixante-dix ans !" (Déclaration faite, un jour, sur le ton de la plaisanterie, par Sophie Moniotte, 25 ans, alors patineuse artistique aux côtés de Pascal Lavanchy).

Il y a quelques années maintenant, je tombe, un jour, nez à nez avec Jean-Paul Escande, professeur de médecine bien connu et pourfendeur du dopage. Ça s'est passé dans un bus parisien. Et là, je saute sur l'auguste professeur de médecine et lui pose tout de go une question simple :

- Prenons un athlète qui affiche 80 kg de poids de forme. Il se blesse, ce qui va lui infliger quelques semaines d'immobilisation, avec la fonte musculaire qui va avec. Seulement voilà : d'importants championnats se profilent à l'horizon. Ma question au médecin : pourquoi la médecine sportive n'aiderait-elle pas ce sportif à récupérer plus vite sa musculature de manière  à revenir plus rapidement à son poids de forme antérieur ? Et en quoi cette procédure relèverait-elle du dopage si elle est strictement encadrée par des médecins et si notre sportif se contente de revenir à son poids initial ?

Notre professeur de médecine s'est contenté de hocher la tête en marmonnant que, dans l'état actuel des choses, il ne voyait pas bien comment l'on pourrait faire.

Il est peut-être là, le vrai problème du dopage : dans la couardise de scientifiques qui ont abandonné le terrain à de simples bureaucrates ou à des chasseurs de sorcières, en déconnection totale avec la réalité.

La réalité ? Dites-moi donc ce que cette image (bien réelle) vous inspire : Coupe du monde de cyclisme, 2003.

Pratiquer le cyclisme en professionnel nuit gravement à la santé !
C'est moi qui ai rajouté la question en lettres rouges : "comment protéger ce cycliste des gaz d'échappement ?????"

Un peu à la même époque que la rencontre avec le professeur Escande, soit au temps de la présence de Lance Armstrong (et Jan Ulrich) dans le Tour de France, je prends l'initiative d'écrire à la direction du quotidien l'Équipe ainsi qu'au ministère de la Jeunesse et des Sports - nous devions être en avril ou au début de mai - et je leur fais la proposition suivante : je suggérais que quelqu'un profite de la future ascension de l'Alpe d'Huez (lequel figurait au programme du Tour de France cette année-là) pour se livrer à une petite expérience scientifique. Précision utile : le ministre de la Jeunesse et des Sports de l'époque s'appelle Jean-François Lamour et j'ai de bonnes raisons de m'adresser à lui : il est double médaillé olympique d'escrime et, surtout, médecin de formation.

Ça vous paraît bizarre, n'est-ce pas, une petite expérience scientifique lors de l'ascension de l'Alpe d'Huez ? Alors, offrons-nous un petit pense-bête.

 

 

En regardant ces images, vous avez compris, je suppose, quel était l'objet de mes préoccupations. Oui ? Non ? Regardez bien, surtout les deux dernières images.

Ce qu'on voit sur ces images, et surtout lors du direct à la télévision ? Ce sont des coureurs cyclistes s'insinuant dans un véritable boyau d'un peu plus d'un mètre de large, avec un mur de spectateurs à gauche, un mur de spectateurs à droite, qui s'écartent au dernier moment pour laisser passer les coureurs. Regardez bien à quel niveau se situe la tête - donc les narines - des cyclistes par rapport à la tête des spectateurs.

Vous avez compris ?

Si vous avez un peu de jugeote, alors, vous avez compris que cette montée de l'Alpe d'Huez consiste à imposer aux coureurs de traverser un boyau d'un peu plus d'un mètre de large, et dans lequel l'air est très pauvre en oxygène et très riche en CO2, sans oublier l'humidité de l'air expiré et les microbes qui vont avec !

- pauvre en oxygène : normal, nous sommes en altitude, et de surcroît, les dizaines de milliers de spectateurs absorbent une grande partie de l'oxygène ambiant.

- riche en CO2 : regardez bien les images et estimez la quantité de dioxyde de carbone rejeté par ces milliers de narines... Mettons que le temps soit beau, donc ensoleillé, ce qui va nous faire une température de l'ordre de 40/45° au soleil (vous voyez des arbres sur les photos ?). Principe de physique : l'air chaud est plus léger que l'air froid, ou dit autrement : les couches d'air se disposent toujours de bas en haut, selon un gradient de température croissant. Ce qui veut dire qu'au soleil, l'air expiré par les spectateurs (éjecté à 37°, donc plus "froid" que l'air ambiant) va être littéralement plaqué au sol jusqu'à ce qu'il se réchauffe et se dissipe, ce qui va prendre un certain temps. Et c'est dans cette zone-là que va se situer la tête des coureurs, et c'est aussi une des raisons - outre la pente - qui expliquent que bien des coureurs se mettent systématiquement en danseuse, comme pour s'élever au-dessus des miasmes générés par la respiration du public.

- humidité et microbes : l'air que nous expirons est bien plus humide que l'air ambiant ; pour preuve, en hiver, lorsque nous respirons et parlons, de la buée se forme instantanément sous forme de vapeur d'eau. Quant aux microbes, difficile d'imaginer que, parmi les dizaines de milliers de spectateurs massés sur ces pentes, personne ne souffre de rhume ou de bronchite, avec les conséquences qu'on imagine lorsque les gens éternuent ou toussent ! 

- ajoutons à tout cela que, dans cet étroit boyau, se faufilent les véhicules accompagnateurs, ou de la direction de course, motos des journalistes et photographes, avec leurs pots d'échappement, comme sur la toute première image.

Tout cela fait du Tour de France (+ le Giro et la Vuelta) l'épreuve athlétique la plus polluée au monde !

C'est la raison pour laquelle je demandais à la direction de l'Equipe, ainsi qu'au médecin-ministre de la Jeunesse et des Sports de faire procéder, aux fins d'analyse, à des prélèvements d'air dans une zone située entre 1 et 2 mètres de hauteur à l'intérieur de ce boyau formé par les spectateurs du Tour de France.

Voilà qui nous aurait livré des informations scientifiques importantes sur une des principales motivations de la consommation d'EPO (exogène) par certains coureurs cyclistes.

Bien entendu, je n'ai jamais eu la moindre réponse à mes courriers. Mais, entre nous, nul n'est besoin de sortir de Harvard ou de Stanford pour comprendre que, dans ces étapes de haute montagne, notamment avec tout ce public, des athlètes en plein effort doivent affronter une dette d'oxygène tout à fait phénoménale.

Autre question que je posai, naguère au professeur de médecine Jean-Paul Escande : si, pour escalader un col ou, plus généralement, pour effectuer un effort physique donné, j'ai besoin de 2000 volumes d'oxygène et si, pour cause de raréfaction de l'air (altitude) et de pollution (spectateurs, véhicules accompagnateurs), je n'ai que 1600 volumes à disposition, où diable vais-je trouver les 400 volumes manquants ?

Là encore, zéro réponse de notre pourfendeur du dopage. Dans ces conditions, j'estime qu'en l'absence d'une réponse scientifique adéquate, la prise d'EPO par les coureurs cyclistes relève non pas du dopage mais de la plus simple LÉGITIME DÉFENSE !

À moins que l'UCI n'opte bientôt pour une distribution systématique de masques à oxygène lors des étapes de montagne ainsi que pour l'adoption tout aussi systématique de véhicules électriques (accompagnateurs) sur les courses cyclistes !

Chiche !

Mais, au fait, que quelqu'un me donne une définition scientifique - et non policière ! - du "dopage".

Pourquoi cette question ? Tout simplement parce que l'on voit bien que ce sont les tests de dépistage en laboratoire - cf. le fameux laboratoire de Chatenay-Malabry - qui ont toujours servi à démasquer les présumés dopés, le tout sur la base de la découverte dans le sang ou les urines de telle ou telle substance interdite.

Question : quid des caissons hypoxy, des séjours en altitude, de l'électrostimulation voire de la sophrologie ou de l'hypnose ? Vous saisissez ? Non ? Alors voyons ce qu'il en est   des effets de l'altitude sur la performance sportive. 




Je cite : Après plusieurs semaines en altitude, on observe une augmentation du nombre des érythrocytes circulants (globules rouges). Le manque d'oxygène stimule en effet la sécrétion d'érythropoïétine...

Pour mémoire, le petit nom de l'érythropoïétine c'est E.P.O. Alors, bien entendu, il y a l'EPO endogène et l'EPO exogène... Il n'empêche, une augmentation des globules rouges dans le sang n'est pas forcément synonyme de dopage. Elle peut être obtenue de plusieurs manières, comme en attestent les performances, dans les courses de fond et de demi-fond, des ressortissants des hauts-plateaux africains ou latino-américains.

Rappelons que l'oxygène est le principal carburant de l'effort musculaire.


Quelle que soit l'altitude à laquelle nous nous trouvons, l'oxygène représente près de 21% des gaz présents dans l'air. Comme l'air se raréfie avec l'altitude, la quantité d'oxygène disponible diminue. Alors qu'au niveau de la mer, les pressions de l'air et de l'oxygène sont respectivement de 760 mmHg et 150 mmHg (mmHg = millimètres de mercure), au sommet de l'Everest, ces valeurs sont divisées par trois (250 et 43 mmHg).
L'appauvrissement de la quantité d'oxygène dans l'atmosphère se répercute à tous les "étages" de l'organisme. La pression en oxygène baisse au niveau des poumons, du sang et des tissus musculaires.
Or, nous savons que l'oxygène est un élément majeur grâce auquel l'organisme produit l'énergie nécessaire à la préservation de sa vie et de sa capacité d'action (physiologie / l'oxygène). Moins d'oxygène signifie moins d'énergie ce qui induit à son tour moins de possibilités d'action.
Nous allons voir comment l'organisme se "modifie" pour tenter de limiter la perte de son autonomie motrice. (…) Nous avons signalé que la baisse de la densité de l'air a deux actions antagonistes sur l'exercice physique :

- elle le favorise par une diminution de la résistance à l'avancement ;- elle le limite par la baisse de la quantité d'oxygène disponible ;
Rapportés aux filières énergétiques, ces deux mécanismes rendent les exercices anaérobies (sans oxygène) plus faciles et les exercices aérobies plus difficiles. Ainsi à Mexico, les records mondiaux ont été égalés ou améliorés jusqu'au 800m. A partir de cette distance, les performances ont été réduites dans des proportions comprises entre 2 et 15% selon les épreuves (par exemple le marathon a été couru en plus de 2h20'). Si nous nous intéressons plus spécialement aux qualités maximales aérobies (VO2max), nous constatons que, même chez des sujets acclimatés, ces qualités diminuent avec l'augmentation d'altitude.
Un sédentaire qui déciderait d'aller passer ses vacances dans la capitale de la Bolivie (La Paz : 3700m) verrait sa VO2max diminuer de près de 15%. Un marathonien de haut-niveau choisissant d'aller s'entraîner au même endroit verrait sa VO2max chuter de 30%.
Cette baisse est en partie liée à un temps d'acclimatation insuffisant. Toutefois le temps "ne fait pas tout à l'affaire". En effet, les habitants nés et ayant toujours vécu en altitude présentent eux-aussi des niveaux aérobies maximums inférieurs à ceux des personnes vivant au niveau de la mer.

Nous tirons la grande majorité de notre énergie de processus de transformation ayant l'oxygène comme accepteur final. Sans cet élément, nous ne disposerions que de 5% de notre capacité énergétique. 
Si l'oxygène est important pour la survie, il l'est également pour la réalisation d'une performance physique. Parmi toutes les causes d'arrêt de l'exercice, l'hypothèse d'un déficit d'oxygène est largement répandue. Cette conjecture fait l'objet d'un grand débat entre spécialistes de la physiologie de l'effort. Deux interrogations sont débattues. 
1. La capacité à fournir un effort important est-elle limitée par l'apport d'oxygène ?
2. Si tel est le cas, où se situe la limitation ? (…) Nous avons vu que l'hémoglobine capte l'oxygène entrant dans le sang puis le transporte jusqu'aux cellules. Si à la sortie des poumons, la totalité de l'hémoglobine a fixé de l'oxygène, nous pouvons estimer que la barrière pulmonaire ne limite pas le passage de l'oxygène. 
Au repos, 97-99% de l'hémoglobine porte de l'oxygène. Nous disons qu'elle est saturée en oxygène à 97-99%. A l'exercice intense, les sujets sédentaires et moyennement entraînés ne montrent pas de baisse du taux de saturation de l'hémoglobine. En revanche, chez certains athlètes très entraînés ce taux baisse jusqu'à atteindre des valeurs proches de 90% (Powers et al 1988). Près de 10% de l'hémoglobine n'a pas le temps de se charger en oxygène pendant le passage au niveau des poumons (Dempsey et al 1984, Williams et al 1986, Powers et al 1988, Nichols et al 1999). La diminution de la capacité de transport de l'O2 qui résulte de cette baisse de la saturation pourrait être un facteur limitant la performance (Ekblom et al 1975, Hughson et al 1995). 
Cette éventuelle limitation centrale est confirmée par le fait que tous les moyens permettant d'améliorer l'apport d'oxygène aux muscles (dopage sanguin, ingestion d'EPO, inhalation d'air enrichi en oxygène) contribuent, chez les athlètes confirmés présentant une désaturation sanguine en oxygène, à : 
- augmenter la VO2max
- ramener la saturation en oxygène à ses valeurs maximales (Powers et al, 1989). 
En revanche, ces artifices ne changent rien aux valeurs maximales aérobies atteintes par des sujets moins entraînés ne présentant pas de baisse du taux d'oxygène dans le sang.


Citation : Tous les moyens permettant d'améliorer l'apport d'oxygène aux muscles (dopage sanguin, ingestion d'EPO, inhalation d'air enrichi en oxygène) contribuent, chez les athlètes confirmés présentant une désaturation sanguine en oxygène, à 1. augmenter la VO2max, 2. ramener la saturation en oxygène à ses valeurs maximales.

Je repose, donc, ma question de tout à l'heure, en la modifiant légèrement : ces trois procédures, a. dopage sanguin, b. ingestion d'EPO, c. inhalation d'air enrichi en oxygène sont-elles également  assimilables à du dopage ?

Quelle que soit la réponse, il me faut une explication scientifique !

Une autre question ? Elle porte sur l'effet placebo.

On a vu Marion Jones se livrer à une bien pénible séance d’auto-flagellation en public, au cours de laquelle elle a avoué avoir pris des produits dopants, ce qui lui a valu de perdre ses titres glanés aux J.O. de Sydney. Et moi de m'interroger : mais comment sait-elle qu'elle était dopée ? Jones était-elle suffisamment calée en pharmacologie pour analyser, elle-même, le contenu des fioles qu'on lui a refilées ?

Question : et si le gourou de Marion Jones s'était contenté de lui refiler du liquide physiologique ou du sirop de glucose, que l'autre a avalé en croyant avoir pris un produit magique ? Ce qui expliquerait pourquoi elle n'a jamais été testée positive ?

Question : et si tel ou tel "témoin" attestant avoir vu Lance Armstrong prendre tel ou tel produit dopant se trompait complètement, dès lors que le gourou de l'US-Postal avait pris soin d'introduire un placebo dans les seringues, en lieu et place de l'E.P.O. ? On aurait eu des coureurs "dopés sans dopant". Inimaginable ?

Que l'on m'explique, alors, pourquoi l'on enseigne l'effet placebo en Fac de médecine !  

Et c'est bien parce que cet effet placebo ne saurait être négligé dans la pratique sportive que la reine des preuves, en matière de dopage, devrait rester le test scientifique - tel que pratiqué sur le Tour de France - et lui seul !

Quand je pense que la France dispose d'un institut de pointe en matière de recherche sur le sport, je veux parler de l'INSEP (Institut National du Sport, de l'Expertise et de la Performance) !

Une autre citation ?
Fundamentalism in the United States went stronger and instilled into the people the idea that alcohol was the cause of all the evils and sins; therefore, banning alcohol consumption would end with these problems.
Le fondamentalisme se mit à prendre toujours plus d'ampleur aux Etats-Unis, instillant dans la tête des gens l'idée selon laquelle l'alcool était la source de tous les maux et de tous les péchés. C'est pour cette raison qu'il fallait en finir avec l'alcool si l'on voulait éradiquer ces problèmes. 


Prochain épisode : Le complot, ou quand l'USADA (agence états-unienne pour la lutte antidopage)  réinvente le puritanisme fondamentaliste pour assouvir des buts inavouables




Le complot ou quand l'USADA se drape de puritanisme fondamentaliste pour assouvir des projets inavouables

Question à cinq cents millions de dollars : qui se cache réellement derrière cette (tardive) campagne de dénigrement de Lance Armstrong, et à supposer que cette campagne réussisse, à qui profite réellement le crime ?

Question subsidiaire : quel serait l'avenir du Tour de France, de l'agence française contre le dopage et de l'organisateur A.S.O. si le recordman de victoires sur le Tour était privé de ses trophées pour..., mais pour quoi au fait ? 

En résumé, il ne faut pas se bercer d'illusions : si l'actuelle campagne de l'USADA contre Lance Armstrong réussit, alors l'organisation de la lutte  antidopage sur le Tour de France est discréditée pour très longtemps et, avec elle, le Tour de France lui-même !

Les États-Unis, c'est bien la plus grande démocratie occidentale ? Grande par la taille du pays ou par la force des institutions et des dispositifs censés protéger les droits humains, à commencer par ceux des plus faibles ?

Le fait est que cette démocratie autoproclamée, qui n'hésite pas à lancer des guerres dans des pays pour en modifier le gouvernement, cumule les paradoxes.

Ce pays, qui est né d'une guerre de libération contre la puissance coloniale anglaise, ne s'est-il pas aussi constitué sur des fondations qui ne furent rien d'autre qu'un génocide, celui des premiers habitants du pays ? Et ce pays, qui vante son attachement aux libertés de pensée et de culte, via sa constitution, n'a-t-il pas été également le plus grand sponsor de dictatures dans la région, renversant des démocraties ici, installant des dictatures là ?

Du coup, plus personne ne s'étonne de voir cette belle démocratie américaine violer la souveraineté de l'Etat cubain, avec la permanence d'une base militaire non désirée sur le sol de la grande Île, laquelle base (Guantánamo) allait rendre possible l'une des plus grosses escroqueries de l'histoire des droits humains, avec la déportation de centaines de "terroristes" présumés, impossibles à installer sur le sol américain même, comme preuve de l'illégalité de la procédure ayant conduit à leur kidnapping. 

Autant dire que dès lors qu'il s'agit de s'asseoir sur les droits d'individus préalablement stigmatisés, les États-Unis comptent parmi les champions du monde des violations des droits les plus élémentaires ! Le tout avec la plus parfaite bonne conscience !

Ou le plus parfait cynisme.

De fait, l'Agence états-unienne de lutte contre le dopage est un parfait avatar de ce fonctionnement cynique parfaitement assumé !

Ce qui va suivre est une sorte de docu-fiction...

Ce jour-là, des officiels du sport américain, dont le secrétaire général de l'USADA (Agence antidopage pour les Etats-Unis) sont convoqués en toute discrétion dans une villa cossue des hauts de Beverly Hills pour y rencontrer un émissaire de l'émir du Qatar. Ce dernier ne va pas y aller par quatre chemins.

- Messieurs, nous avons décidé de lancer aux États-Unis une grande course cycliste. La plus grande course cycliste, qui devrait attirer ici les plus grandes équipes et les plus grands coureurs du monde entier.

Et c'est là qu'un de ses interlocuteurs l'interrompt :

- Et elle aura lieu à quelle date, votre course ?

- Ben, entre la fin juin et la mi-juillet.

- Pardon ?

- Vous m'avez bien entendu : entre la fin juin et la mi-juillet.

- Mais, à cette date, toutes les équipes sont sur le Tour de France !

- Le Tour de France ! Cette vieillerie ? Vous pensez que nous n'avons pas les moyens, je veux dire financiers, pour attirer ici les plus grands coureurs ?

- Sauf votre respect, le Tour de France est une épreuve mythique, avec des lieux légendaires : le Tour Malet, le Ventoux, l'Alpe d'Huez, le Galibier... Ça fait 110 ans qu'ils sont là. C'est le plus grand événement sportif au monde, avec les Jeux Olympiques et la Coupe du monde de football qui, eux, n'ont lieu que tous les quatre ans !

- Avec ce qu'il faut d'argent, on mettra en place un énorme événement cycliste dans ce pays, qui en a grand besoin. Et puis, si ça ne suffit pas, vous nous aiderez à en finir avec le Tour de France. Ça serait dans votre intérêt, non ? Après tout, un grand tour cycliste, aux States, pour vous, c'est tout bénef, non ?

Vous voulez savoir qui m'a raconté cette anecdote ?

Je vous le dirai plus tard, peut-être. En attendant, voici à quoi pourrait ressembler le parcours du tout premier grand tour - Non ! il ne faut pas dire "tour" car ce ne sera pas un tour mais une traversée des États-Unis. Le nom choisi ? Coast to coast. D'Est en Ouest. Entre nous, avec ce que les États-Unis comptent comme grandes villes, les possibilités de parcours sont innombrables. 

Seulement voilà : avec de l'argent, le Qatar peut toujours offrir des primes trois, quatre, cinq fois supérieures à celles versées sur le Tour de France. Le problème, c'est l'aura tout à fait mythique dont jouit la Grande Boucle auprès des cyclistes et des milieux sportifs. Et en cas de concurrence frontale, pas sûr que les cyclistes lâchent le Tour de France, mais avec la promesse de gains... Et puis, en représailles, les Français peuvent toujours faire bloc et générer assez de sponsoring pour surenchérir sur le plan des primes. Dans ces conditions, il ne restait plus qu'une solution à la clique organisée autour des oligarques arabes : couler le Tour de France. Et, pour ce faire, on allait commencer par le discréditer.

Ainsi commença l'affaire Lance Armstrong.

- Mais, va-t-on me demander, Armstrong est le plus grand cycliste américain. Qu'est-ce qu'il vient faire dans cette machination ?

- Ben, c'est tout simple : il va fournir un alibi en béton aux conspirateurs américains.

- Comment ça, un alibi ?

- C'est évident, non ? En s'en prenant au plus prestigieux des leurs, ceux qui veulent couler Armstrong se rendent quasiment inattaquables et insoupçonnables de quelque magouille que ce soit, en montrant à tous qu'ils sont au-dessus de toute considération nationaliste ou chauvine, pour preuve : ils sont prêts à démasquer le tricheur qu'est Lance Armstrong.

- Mais le tricheur, comme vous dites, il n'y a jamais eu de tests positifs contre lui, puisqu'il n'a été disqualifié d'aucune de ses victoires, contrairement à un Contador ou à un Floyd Landis. Les tests scientifiques pratiqués sur le Tour de France sur Armstrong plaident en sa faveur, et ça, l'USADA peut difficilement le contester.

- Mais c'est là que vous vous trompez : l'USADA se contrefiche du fait qu'Armstrong n'ait jamais - ou quasiment jamais - été testé positif. Toute sa stratégie actuelle consiste à faire appel à d'autres ressources que scientifiques, le but étant de discréditer, précisément, les tests pratiqués par l'Agence Française antidopage sur le Tour de France, laquelle est la cible principale visée dans cette affaire.

- Vous voulez dire qu'Armstrong ne serait qu'un élément marginal, une cible collatérale, dans cette affaire ?

- Parfaitement. Ce n'est pas Armstrong qu'on vise : il n'est qu'un instrument de la stratégie des Américains. Qu'il tombe, et c'est tout l'appareil autour du Tour de France qui tombe avec lui, car ils sont tous solidaires : celui qui a raflé les sept victoires et ceux qui les lui ont accordées. Tant il est vrai que le scandale Armstrong aura un impact dévastateur sur la crédibilité des tests antidopage sur le Tour de France, et par voie de conséquence, sur l'organisation de la course. Ce sera pire que l'affaire Festina (une équipe qui a disparu, soit dit en passant, faute de sponsor !) : cette fois, ce n'est pas une équipe qui tombe, c'est tout le dispositif Tour de France ! Et de surcroît, Armstrong nous offre un alibi en béton, personne ne pouvant nous suspecter d'intentions malveillantes contre les Français, alors que, selon toute apparence, la principale victime de l'affaire, c'est notre propre compatriote. Voilà ce que ces gens doivent penser.

Et comme les Américains sont malins, ne voilà-t-il pas qu'en France même, ils ont réussi à enrôler de puissants alliés, à la F.F.C. (Fédération Française de Cyclisme), voire au sein même de l'ennemi à abattre : A.S.O., je pense à l'Équipe. C'est fou non ! Et ce sont ces pauvres naïfs qui vont se farcir le sale boulot. Avec ça, qui pourrait suspecter les Américains d'intentions malignes envers le Tour de France si ce sont les Français eux-mêmes qui se tirent une balle, voire une rafale, dans le pied ! 

Tout cela vous paraît bien abracadabrantesque, n'est-ce pas ? Si c'est le cas, c'est que vous ne savez pas jouer aux échecs. Dans le cas contraire, alors vous savez qu'il s'avère parfois nécessaire de céder un pion, un cavalier, une tour, pour l'emporter sur l'adversaire.

Vous me croyez si je vous dis que, dans cette affaire de dopage, Lance Armstrong n'est qu'un pion, que d'aucuns, dans son propre pays, sont prêts à sacrifier, moyennant des méthodes stalino-maccartho-mafieuses, leur véritable cible n'étant pas ce coureur professionnel retraité, contre lequel ils n'ont pas grand chose ; leur véritable cible est ce Tour de France, propriété d'Amaury Sport Organisation, qu'ils ne sont pas prêts de racheter et qu'ils ne peuvent pas délocaliser. D'où la décision de le détruire en le discréditant, en sachant pertinemment que son discrédit rejaillira sur ceux qui auront fait preuve de laxisme voire de complicité en lui maintenant toutes ces victoires. 

Après quoi, les émirs aux poches pleines de pétrodollars n'auront qu'à sortir leur carnet de chèques pour attirer vers la nouvelle course américaine la quasi-totalité des équipes cyclistes et les meilleurs coureurs. Et à ce petit jeu, le Tour de France ne sera plus qu'une coquille vide. Le tout, en grande partie grâce à l'Équipe !

Que ceux qui ne croient pas en l'histoire qui précède reprennent le dossier Armstrong depuis le début.

Le Tour de France est une épreuve sportive qui repose sur un code de procédure simple, s'agissant de la lutte antidopage : à chaque fin d'étape, le porteur du maillot jaune, voire les porteurs de maillots distinctifs, ainsi qu'un certain nombre de coureurs tirés au sort sont immédiatement emmenés vers la prise d'urine aux fins d'analyse. Et malheur à celui dont les échantillons A et B se seront avérés positifs, comme preuve de l'ingestion par lui de substance illicites, même à l'état de traces, comme ce fut le cas de Contador. C'est ainsi que le travail des enquêteurs a permis de sanctionner des gens comme Vinokourov pour suspiscion d'auto-transfusion sanguine ou encore Floyd Landis.

Les choses sont donc simples : ou bien les tests scientifiques sont efficaces, ou ils ne le sont pas.

Or, officiellement, ces tests sont efficaces. Alors, il est où, le problème, s'agissant d'Armstrong ?

Il est que l'USADA le soupçonne de dopage.

Oui, et alors ? Il est où, le problème, dans la mesure où l'USADA n'est pas en charge du dépistage de produits dopants sur le Tour de France ? Et pourquoi diable l'USADA tient-elle à ce point à interférer sur les affaires d'Armstrong sur le Tour de France, alors qu'elle pourrait se contenter d'opérer sur son ressort, à savoir son domaine de compétence, le territoire américain !

Je vois que vous commencez à poser les bonnes questions ! Si l'USADA a fait des découvertes compromettantes sur Armstrong... sur le sol américain, ça ne devrait en rien concerner le Tour de France mais plutôt les courses effectuées par Armstrong aux Etats-Unis.

Par voie de conséquence, si cet organisme anti-dopage s'intéresse à ce point à la présence d'Armstrong sur le Tour de France - qui n'est pas du ressort de l'USADA -, c'est bien parce que l'activité sportive d'Armstrong aux États-Unis n'intéresse nullement l'agence américaine, ce qui suggère fortement qu'Armstrong n'est pas du tout la cible principale des agissements de l'USADA !

Question : mais qu'est-ce que l'USADA pourrait bien opposer aux tests - négatifs, sauf magouille, sauf complicité - passés par Armstrong sur le Tour de France ? 

1. D'autres tests effectués - forcément - sur le Tour de France ? Ça voudrait dire que des agents de l'USADA auraient enquêté - incognito - sur Armstrong durant ses sept tours ? Inimaginable.

2. L'USADA aurait-elle récupéré des échantillons parmi ceux prélevés sur Armstrong par l'Agence française anti-dopage ? Difficile à imaginer, mais pas impossible, mais les conséquences seraient désastreuses pour les enquêteurs français ! Et, de surcroît, si l'USADA disposait de preuves scientifiques tirés des échantillons d'Armstrong, ce dernier ayant arrêté sa carrière depuis quelque temps déjà, comment expliquer que ces preuves "scientifiques" n'apparaissent que maintenant ? Le plus vraissemblable serait, donc, que :

3. L'USADA n'ait aucun élément scientifique relatif aux activités de Lance Armstrong sur le Tour de France. Dans ce cas, elle ne disposerait que de ragots et de témoignages plus ou moins discutables, dont la recevabilité devant un juge est tout simplement NULLE !

Démonstration : je me souviens avoir lu, il y a quelque temps déjà, dans l'Équipe, le récit d'une ancienne soigneuse de l'équipe US-Postal, de Lance Armstrong, soigneuse qui aurait assisté à ce qui ressemblait à des séances de dopage... Et c'est là que moi, avocat de la défense, je demanderais volontiers au témoin si elle savait avec certitude ce qu'il y avait dans les seringues qu'elle est censée avoir aperçues. Et si dans ces seringues, il n'y avait eu que du liquide physiologique, ou du glucose, ou un simple placebo ?

Moralité : des témoignages du type "je l'ai vu tenant une seringue" n'ont jamais constitué de preuve scientifique de la présence d'un dopant dans ladite seringue !

Et c'est là qu'il nous faut reposer la question : avec quels éléments scientifiques l'USADA compte-t-elle discréditer les tests de dépistage de produits dopants pratiqués sur le Tour de France entre 1999 et 2005, soit les années qui virent Armstrong l'emporter ? 

Car si l'USADA n'a pas de pièces à conviction d'ordre scientifique à opposer à Lance Armstrong - encore une fois, si elles avaient existé, pourquoi diable avoir mis tant de temps à les fournir ? -, n'étant pas compétente pour intervenir sur le Tour de France, on ne voit pas très bien comment, hormis par le biais de méthodes stalino-maccartho-mafieuses, l'agence américaine pourrait sérieusement contester la validité des victoires de Lance Armstrong sur le Tour de France !

En attendant d'en apprendre un peu plus sur la question, examinons quelques projets de parcours tels que concoctés par les promoteurs américano-qataris de la grande course transaméricaine "Coast to Coast", censée supplanter le Tour de France.






Mais, pour créer une grande course cycliste sur le continent nord-américain, il faut d'abord couler le Tour de France, avec l'aide des Français eux-mêmes !




Détail intéressant : l'on a vu récemment Lance Armstrong prendre la parole au cours d'une réunion dédiée à son association de lutte contre le cancer. L'homme y a affiché une bien belle sérénité. Et à cela, il y a certainement de bonnes raisons, dont la plus importante : le DROIT !




Prochain épisode : Staline et les grands inquisiteurs