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mercredi 1 septembre 2010

Débriefing 02/10



El goleador...

0,63 but par match. Tel est le palmarès de David Trézéguet : Monsieur un but tous les deux matches.

Je suis allé à la pêche aux stats sur Internet, notamment sur le site de
France 2 :

Quel est le meilleur attaquant des années 2000 ? Pour vous aider dans votre choix, voici quelques stats : sachant que sont pris en compte seuls les buts marqués dans les 5 plus grands championats ainsi que les buts marqués en ligue des champions entre les saisons 1999/2000 et 2006/2007

Henry : 209 buts en 331 matchs (0.63 buts par match)
Trézéguet : 147 buts en 234 matchs (0.63)
Van nistelrooy : 167 buts en 249 matchs (0.61)
Ronaldo : 115 buts en 194 matchs (0.59)
Makaay : 184 buts en 314 matchs (0.59)
Shevshenko : 170 buts en 316 matchs (0.54)
Eto'o : 128 buts en 254 matchs (0.50)
Owen : 111 buts en 219 matchs (0.48)
Raul : 149 buts en 347 matchs (0.43)


Comme on peut le voir, Trézéguet est un vrai goléador. Comment oublier cette reprise de volée en finale de championnat d'Europe face à l'Italie, en 2000 ?

Dans ces conditions, comment en est-on arrivé à l'éviction peu glorieuse de Trézéguet de l'équipe de France ?

Moi, j'aime bien Domenech, mais il y a des jours où je me demande si une de ses plus grosses boulettes n'a pas été cette éviction parfaitement injustifiée, en tout cas pas du tout justifiée par les stats : les mêmes que Thierry Henry !

Surtout, tout cela intervient sans la moindre explication, sans le moindre débriefing.

Bien entendu, je connais la chanson : "tel joueur n'entre pas dans les plans du sélectionneur ou de l'entraîneur" ; "tel joueur ne s'intègre pas dans le schéma de jeu du sélectionneur", etc. Moi, j'avoue que ce genre de formule m'a toujours fait doucement rigoler !

Il était où le problème ? Que Trézéguet ne soit qu'un renard des surfaces, qui ne participe quasiment jamais au jeu défensif de l'équipe, se contentant d'attendre qu'on lui mette le ballon dans les pieds ? Soit, mais cela l'a-t-il empêché de se forger un palmarès, y compris dans ce pays spécialiste du "cadenas" qu'est l'Italie ? Par ailleurs, quelqu'un, en Allemagne, a-t-il jamais reproché, en son temps, à l'illustrissime Gerd Müller de n'être qu'un renard des surfaces ?

Moi, je pense qu'un des principaux problèmes de cette équipe de France, depuis 2006, c'est David Trézéguet, que Raymond Domenech n'a pas su utiliser à sa juste mesure.

Débriefons :

9 juillet 2006. Finale de la coupe du monde de football. J'ai déjà dit tout le mal que je pensais de la non-sélection de Ludovic Giuly, dont le but premier était de ne pas faire de l'ombre à la "star galactique", Zidane. On a vu comment ce dernier a remercié son sélectionneur. Le problème de certains gamins immatures, comme dirait Roselyne Bachelot, c'est qu'à force de tout leur céder, ils finissent par toujours en demander plus, ce qui explique que tant d'adolescents finissent par devenir ingérables, à force de n'avoir devant eux que des adultes défaillants.

En 2006, Domenech se met tout seul en difficulté en choisissant délibérément d'aller en Allemagne avec une équipe plus faible que la formule optimale (Giuly versus Dhorasso). De fait, il est lui-même si peu convaincu par sa stratégie qu'il ne fait jamais appel à Dhorasso. Et il n'y avait pas que Dhorasso ! Conforté dans son rôle d'enfant gâté, Zidane pête les plombs, tout en sachant que personne n'ira le lui reprocher !

Et c'est là que l'infortuné Trézéguet, qui végète sur le banc de touche, doit entrer en jeu, en lieu et place de Ribéry. Nous sommes en pleine prolongation, c'est dire si David attend depuis un certain temps. Et bien entendu, les Français jouent déjà à dix. Bonjour la pression pour le malheureux Trézéguet ! Domenech aurait voulu savonner la planche de son attaquant qu'il n'aurait pas procédé autrement. Ce qui me fait penser, par parenthèse, à cette entrée calamiteuse de Ben Arfa, à Marseille, que Deschamps lance sur le terrain face à Benfica, alors même qu'il ne reste qu'une poignée de minutes et que les Portugais mènent par 2 à 1. Qu'un Ben Arfa passablement énervé par le cadeau empoisonné que lui fait son coach pête les plombs quelques secondes plus tard est parfaitement compréhensible. Dans cette affaire, le fautif, c'est le coach !

Trézéguet aurait certainement rêvé une meilleure entrée en jeu que de se voir quasiment "sommé" de sauver une équipe de France réduite à dix. Il est plus que certain qu'il doit maudire Domenech au moment où il entre sur le terrain. Les adeptes de Freud parleraient d'acte manqué pour la suite des opérations, je pense à ce tir au but que Trézéguet, le sauveur de la finale européenne de 2000, loupe presque par résignation, une façon de dire "Merde !" à Domenech. Lequel va lui garder une dent de mammouth après ce raté, dont on se demande presque dans quelle mesure il ne l'a pas souhaité, histoire de dire : "Vous voyez, il est nul ce Trézéguet !" Tout le monde a bien vu que le loupé de cette finale de coupe du monde va sonner le commencement de la fin de l'engagement de Trézéguet en équipe de France.

Sauf que là, la prétendue nullité de Trézéguet, on n'y croit pas une seconde. Ses statistiques sont là : même moyenne de buts que Thierry Henry, meilleures stats que Raúl !

Très honnêtement, je crois pouvoir dire que, malgré la sympathie qu'il peut m'inspirer, Raymond Domenech pâtit d'une tare manifeste : un manque évident de psychologie - mais peut-être cela a-t-il à voir avec son goût présumé pour l'astrologie ? -, qui fait que des considérations sentimentales vont venir se greffer dans ses relations avec les joueurs, alors qu'un entraîneur est d'abord un technicien, pas un confesseur ni un gourou !

Circonstance aggravante : le mutisme, le refus de communiquer. Trézéguet s'en va, mais on ne nous dit pas pourquoi. Et on ne peut que fort difficilement nous le dire, dès lors que ce ne sont pas les qualités intrinsèques du joueur - qui continue de cartonner en Italie, malgré les blessures - qui sont en cause.

Donc, tout va se passer dans le non dit... Quelle erreur, quelle colossale erreur !

Le fait est que, depuis l'éviction de Trézéguet, jamais on n'avait autant tancé la stérilité de l'attaque française ! Et c'est là que Domenech se retrouve dans la position de l'arroseur arrosé. Mais il n'est pas le seul à déguster !

C'est quand même incroyable, non ? La France a des attaquants qui cartonnent dans les meilleurs clubs européens, et qui pataugent en équipe nationale. Remarquez, ils ne sont pas les seuls, si j'en juge par les problèmes d'un Ronaldo avec le Portugal, d'un Rooney avec l'Angleterre, d'un Messi ou d'un Higuain avec l'Argentine, d'un Eto'o avec le Cameroun...

Y aurait-il eu une malédiction frappant l'attaque de l'équipe de France ? Il faut croire. Et en ce qui me concerne, j'aurais un début d'explication qui, sans être mathématique (la psychologie échappe aux lois de l'arithmétique, dans la mesure où l'on ne peut pas y affirmer que si a, alors b, et par voie de conséquence que si b, alors a !), n'en est pas moins "cartésienne".

Par parenthèse, l'importance de la psychologie dans le sport, singulièrement le football, nous est démontrée par la propension des équipes à gagner plus facilement à domicile qu'à l'extérieur. Ce qui est évidemment lié à la chaleur apportée par le public. On me dira qu'on a vu le PSG perdre une flopée de matches au Parc des Princes, et se mettre à gagner des matches importants en jouant à huis clos, sans public. Nous évoquerons, un jour, la psychologie toute particulière des joueurs parisiens.

Donc, le fait de jouer à domicile dope les joueurs. C'est bien connu. Les considérations psychologiques ne sont donc pas des peccadilles.

Où Domenech pèche-t-il psychologiquement ?

D'abord dans le non dit. Parce que je suis certain qu'il n'a jamais appelé David Trézéguet pour lui dire qu'il ne voulait plus de lui en équipe de France, pas plus qu'il n'a prévenu ses coéquipiers qu'ils devraient désormais oublier Trézéguet, pas plus qu'il n'a communiqué à l'opinion publique sa décision. Cette culture du "non-dit" s'est avérée, en la matière, tout bonnement catastrophique.

Parce qu'elle transpire la fumisterie, dès lors qu'une annonce de l'éviction officielle de Trézéguet aurait justifié des explications rationnelles de cette mise à l'écart. Or, des explicaitons rationnelles, de toute évidence, Domenech n'en avait pas ou ne voulait pas en fournir !

Mais, ce faisant, il plombait l'atmosphère pour tout le monde, à commencer par les attaquants de l'équipe de France, à qui il refilait une sacrée patate chaude, tout en les faisant passer pour des traîtres, des faux frères.

1. Domenech refile à Henry, Anelka et Cie la patate chaude.

Parce qu'il a beau ne pas aimer communiquer, Domenech adresse tout de même à ses attaquants un message subliminal : "Maintenant que j'ai évincé Trézéguet, les buts qu'il ne marquera plus, c'est vous qui allez les marquer !".

Tu parles d'un cadeau !

Et voilà les bleus frappés d'un "syndrome Trézéguet", qui va voir l
es formidables attaquants que sont Henry, Anelka, Gignac et consorts commencer lentement et sûrement à s'étioler en équipe nationale, tout en flambant en clubs : Arsenal par-ci, Chelsea par-là, Lyon, Toulouse, Bordeaux... Et voilà la France qui ne marque plus de buts, expliquent les experts, cette France qui va se mettre à patauger au sein de son groupe qualificatif, aux côtés de la Serbie, qui caracole en tête, de la Roumanie, de la Lituanie, de l'Autriche et des Îles Féroé.


2. Domenech fait passer Henry, Anelka et Cie pour de faux frères.

Évidemment ! Tout le monde, moi le premier, se dit que l'éviction de Trézéguet de l'attaque de l'Equipe de France va faire des heureux. Parce que ça libère un fauteuil et ça, c'est tout bénef pour les Henry, les Gignac et autre Anelka. Mieux, ou pire : qu'est-ce qui nous dit que ce ne sont pas eux, les Henry, Anelka, Gignac..., qui ont intrigué auprès du sélectionneur, pour faire évincer leur concurrent ?

Voilà comment la mauvaise conscience s'est installée dans la tête des attaquants de l'Equipe de France. Et qui explique que ces mêmes joueurs aient pu ou puissent flamber avec leur club, et se loupent plus ou moins en équipe nationale. Pour moi, il n'y a là aucun mystère ! Le sentiment de culpabilité, ça vous mine un homme. Et ça peut expliquer bien des choses, plus tard.

Après l'éviction de Trézéguet, jamais annoncée officiellement, les joueurs ont semblé manifester de l'indifférence, en tout cas un manque de solidarité patent à l'égard de leur camarade, au point de passer pour des intrigants. Et quand arrive l'affaire Anelka, je me demande si certains ne se sont pas dit : "Non, pas cette fois-ci. Nous avons manqué de solidarité envers David, nous ne nous ferons pas avoir une fois de plus, avec Nico." Du coup, ils montent au créneau, histoire d'être en paix avec leur conscience.

Pour ma part, je considère que les joueurs se sont grandis - en tout cas dans mon estime - en manifestant une si spectaculaire solidarité face à ce qui était une injustice, une de plus, une de trop ! Car il leur aurait été si facile de s'écraser, comme ils l'ont fait pour Trézéguet !

En un mot comme en cent, cette démonstration de solidarité des joueurs de l'équipe de France pour un des leurs frappé d'une injustice flagrante les honore ! Et la Fédération Française de Football devrait, au contraire, les féliciter, au lieu de les tancer, car il fut un temps où des Français voyaient partir des amis, des voisins, récupérés par des messieurs en gabardine gris-souris, membres de la milice ou de la Gestapo, en se contentant d'entrouvrir la porte, voire en se réjouissant secrètement... Je ne suis pas en train d'extrapoler ou de faire des comparaisons insensées. Il se trouve simplement qu'entre 1940 et 1944, des Français ont dénoncé leurs voisins, amis, parents... à la milice, et ce genre de comportement vous mine la réputation d'un pays pour longtemps.

Cette fois-ci, les joueurs ont eu le bon réflexe en disant à tout le monde : "cette fois-ci, ça se fera sans nous !"

Et parce que j'aurais eu tendance à leur reprocher leur apathie face à l'injustice commise envers Trézéguet, je ne peux, cette fois-ci, que leur dire : "Bravo les gars pour votre solidarité envers Nicolas !"