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lundi 6 septembre 2010

Débriefing 08/10



Delirium tremens



D’un Nicolas l’autre !

On pensait naïvement que le voyage en Russie de celui-ci, à l’occasion du Forum économique de Saint-Petersbourg, obéissait à des objectifs commerciaux vitaux, et manifestait comme ambition le resserrement des relations entre Paris et Moscou.

Niet !

Ce que l’on en retiendra, c’est la tirade, sourire aux lèvres, sortie par le plus haut personnage de l’Etat et jugeant des « événements » sportifs « rapportés par la presse » devant son homologue Dmitri Medvedev, comme si le sort de la planète en dépendait.

Le même homme politique qui acquit une certaine célébrité, sur le plan de l’éloquence et du maniement châtié de la langue nationale, à La Courneuve (« On va nettoyer tout ça au Kärcher ! »), lors d’une visite au Salon de l’agriculture à Paris (« Casse-toi, pauv’ con ! ») ou devant un pêcheur breton du Guilvinec (« Descends voir si t’es un homme ! »), s’est permis de donner des leçons de maintien et de bon usage du français à un footballeur – qui dément d’ailleurs avoir tenu les propos qu’un quotidien spécialisé lui impute.

Ainsi, rien n’échappe à Nicolas (Sarkozy), qui tranche de tout : des affaires du monde, des affaires de presse, des affaires de sport. C’est un président universel, omniscient, omniprésent, ovni même.

(...)


Fin de citation

Je revois encore des images de cette rencontre avec la presse, avec un Medvedev qui a dû se pincer intérieurement, en entendant son illustre hôte français divaguer sur des questions de football... Non mais, franchement, vous imaginez De Gaulle en pleine visite officielle à l'étranger, et s'évertuant à planter son interlocuteur, pas le président de l'Oubangui-Chari ou du Zimbabwe, ou d'une obscure république bananière, non, le président de la grande Russie, pour se fourvoyer dans des questions de discipline au sein de l'équipe de France de football ? Et pourquoi pas de l'équipe des minimes, ou des poussins, ou du Paris Gay Football Club ?

Pour tout vous dire, j'ai trouvé ça grotesque, et apparemment, je n'ai pas été le seul. Mais bon, tout le monde sait que la grandeur française n'est plus ce qu'elle fut autrefois, et en disant (écrivant)  cela, je ne pense nullement à l'équipe de France de football !

En tout cas, s'il fallait une preuve de l'ampleur de la crise de délire, je veux dire, de delirium tremens, qui s'est emparée de la France, elle se trouve bien là : le plus incroyable tohu-bohu jamais provoqué par des propos tenus à huis clos et rapportés de façon mensongère par un journal.

Du coup, on s'interroge : mais qui donc, dans cette affaire, a perdu la tête ?

C'est Nicolas Anelka qui déclare, en substance, que si ça n'avait pas été par lui, l'explosion serait certainement venue par quelqu'un d'autre. Et c'est là que je dis à Nico : "d'accord, pas d'accord !" La raison est très simple : dans les faits, l'explosion n'est pas venue que de lui. Pour preuve, le p... de plombs du préparateur physique, Robert Duverne !

Parce que si ça ce n'est pas un p... de plomb, c'est que je ne comprends plus rien aux choses. Par chance, il y avait une caméra de télévision. Trois hommes sur la pelouse : Evra, Duverne et Domenech. Evra est on ne peut plus zen, gardant les mains dans les poches de son survêtement. Duverne s'agite, que Domenech fait mine de retenir. En fait, je suis persuadé que si Domenech n'avait pas été là, il ne se serait rien passé !

Impérial, Evra ! Le commentateur de service, sur France 2, nous dit que les deux hommes ont failli en venir aux mains, séparés par Domenech, ce qui est tout bonnement fallacieux ! Tout le monde aura pourtant vu un Evra visiblement sûr de son fait, et c'est précisément cette froide fermeté qui pousse le préparateur physique à bout. Et fort curieusement, tout le monde se sera excité sur les insultes censées avoir été proférées par Anelka, mais personne ne s'est offusqué de voir un cadre technique, un éducateur, pêter le plombs de façon aussi puérile, devant témoins, allant même jusqu'à balancer dans la nature quelque chose qui aurait pu être un chronomètre ou un sifflet.

Moi, j'ai trouvé le geste de cet éducateur pire que mille insultes proférées par Anelka, parce que si le joueur peut être tancé pour avoir manqué aux us et coutumes, voire à la bienséance - il n'avait qu'à la boucler, après tout ! -, l'éducateur est infiniment plus condamnable, étant donnée, précisément, sa position de cadre, de formateur.

Dans ces conditions, avec de tels cadres incapables de se maîtriser, comment jeter la pierre aux joueurs ?

Duverne n'était pas prêt, dans sa tête, pour affronter une telle adversité. Et sa défaillance explique largement celle de tout le groupe, ce qui peut se résumer en une phrase simple : l'équipe de France n'était pas prête !

Entre autres parce que ce guignol de Duverne - mais il n'est pas le seul ! -, n'a pas compris que le sport, ça ne consiste pas seulement à courir, franchir des obstacles, effectuer un parcours chronométré ou faire des pompes. Le sport, ça suppose d'autres aptitudes que les seules capacités musculaires ! La crise de delirium tremens qui s'empare de Duverne en est la preuve. Le problème est que Duverne n'est pas tout seul ! Mais en ce qui le concerne, je pense qu'il n'avait pas sa place dans l'encadrement de l'équipe de France.

J'écoutais, un jour, une émission de radio concernant une jeune fille ayant opté pour la soudure. Après un BTS, elle a donc intégré un milieu où les femmes se comptent sur le bout des doigts. Il se trouve seulement que la jeune fille est plutôt douée, ce qui l'a amenée à participer à des concours de soudure, comme il existe des compétitions autour des meilleurs ouvriers de France, par exemple. Et j'entends encore cette jeune fille expliquer au journaliste qu'avant la dernière compétition à laquelle elle ait participé, elle a jugé utile de recruter un préparateur mental.

Et moi de penser : pas conne cette fille !

La soudure est une activité très technique que l'on peut assimiler à un sport. Et le sport n'est pas qu'une affaire de muscles ! Il faut aussi pouvoir minimiser son émotion et ses états d'âme. Et c'est là que je me demande qui, au sein de la Fédération Française de Football, a pensé à recruter un préparateur mental au sein du staff. Parce que, outre les joueurs, je connais un certain Robert Duverne qui aurait eu grandement besoin d'une (re)mise à niveau sur le plan psychique, histoire de lui permettre de mieux faire face à la pression, ce que la jeune technicienne en soudure évoquée plus haut avait parfaitement compris.

Préparer les joueurs et le staff sur le plan mental, voilà un "détail" qui semble avoir échappé à la FFF, où l'on croit encore que le sport, ça consiste juste à enfiler une tenue, des chaussures à crampon, et vogue la galère. Quelle erreur ! La famille Smith (Will) a récemment produit un film (Karaté Kid) dans lequel s'illustre le jeune Jaden Smith, dans des performances techniques assez étonnantes, compte tenu du jeune âge du gamin. Son "gourou" se présente sous les traits de Jackie Chan. Et c'est là que j'invite tous ceux qui ont vu le film de se remémorer les paroles du "gourou", qui font penser à un autre "gourou" : celui de la série Kung Fu, avec feu David Carradine, à savoir que les arts martiaux asiatiques ne sauraient se réduire à de vulgaires performances physiques, comme casser des briques à main nue. Il y est aussi question de respect de la vie, de respect de l'adversaire, ne parlons même pas du respect dû à ses maîtres, etc.

Est-ce que vous vous voyez sur un dojo, avec un maître de karaté, de judo ou de taekwondo qui se serait appelé Domenech, avec un joueur (appelons-le Anelka) répondant avec effronterie à son maître ?

Pour ma part, je fais partie de ceux qui sont convaincus de la supériorité de l'esprit sur le corps, qui explique, par exemple, comment des gens parviennent à marcher nus pieds sur des braises, ou comment le petit Chang vient à bout du grand Lendl, à Rolland Garros, et comment un club de foot de sans-grades parvient à éliminer une équipe plus huppée, comme cela arrive régulièrement, parce que le petit y aura cru un peu plus fort que le grand.

Ah oui, j'oubliais : pour manifester leur solidarité envers un camarade qu'ils estiment injustement sanctionné, les joueurs de l'équipe de France refusent de participer à une séance d'entraînement avec Robert Duverne, l'homme qui pête les plombs pous vite que son ombre. En quoi cela constituait-il une violation de la réglementation de la FIFA ? Les joueurs ont-ils seulement décidé de boycotter un match ?

Et voilà comment le simple fait de déprogrammer une séance d'entraînement est devenu une affaire d'Etat artificiellement montée en épingle. Parce que ce n'était qu'un entraînement, rien de plus. Les joueurs auraient fort bien pu le remplacer par une séance de course à pied à travers champs. Et la disproportion constatée entre la banalité de cette "grève" et le tohu-bohu médiatique qu'elle va susciter est un excellent indice de l'état de délabrement avancé dans lequel se trouve la société française, dont les élites sont tellement déconsidérées qu'elles en viennent à se chercher des exutoires à deux balles, exutoires dont une récente chasse aux Roms a été un avatar supplémentaire : ça permet d'occuper les gens pendant un certain temps, histoire de détourner de l'essentiel un peuple complètement déboussolé.  

Le fait est que, dans aucun autre pays, quelques bisbilles de vestiaire n'ont fait l'objet d'un tel traitement médiatique, jusqu'au sommet de l'Etat. Et, dans cette crise collective de delirium tremens, curieusement, à l'image de Patrice Evra, ce sont encore les joueurs qui auront affiché la plus grande maîtrise de leurs nerfs !

C'est dire si je conseille vivement à certains politicards et journaleux plus ou moins obèses de faire du sport !